Norman Nato : Embarquez pour un tour de qualif avec moi !

Le Français nous décrit un tour de Monaco en détail !

Par Franck Drui

25 mai 2017 - 07:30
Norman Nato : Embarquez pour un (...)

On dit souvent que Monaco est un « tourniquet ». C’est bien plus que ça ! Non seulement les 3,337 km de Monaco comportent plus de virages au kilomètre que n’importe quel autre circuit du championnat mais, en plus, les quelques bouts de lignes droites n’en sont pas vraiment tandis que, paradoxalement, certains virages se négocient de manière rectiligne. Montez avec moi (enfin imaginons !) pour un tour de qualification, un tour à fond, à la limite, et vous allez comprendre…

Notre tour commence à la fin d’un tour de chauffe au cours duquel, après être sorti des stands, j’ai mis les pneus en température. Tous les voyants sont au vert ? C’est parti pour un peu moins de 1 minute et 20 secondes en apnée –ou presque !

Nous voilà à l’entrée de la ligne droite des stands, accélérateur enfoncé. Autant vous le dire : ce n’est pas une ligne droite mais une longue courbe à droite, réalité qui n’est pas forcément visible à la télévision.

Je me colle le plus tôt possible à droite contre le mur pour en faire une trajectoire rectiligne et actionner le DRS –c’est le seul endroit du circuit où nous le pouvons. Nous voilà a mi-distance avant le virage de « Sainte-Dévote ». Deux options : soit laisser la voiture partir vers la gauche au ras du rail avant de braquer, soit la maintenir à droite en coupant légèrement la ligne de sortie de stands – c’est la solution que je préfère. Pas question, de toutes façons, de rester au milieu de la piste car elle est bosselée ici, ce qui empêche de freiner tard.

Nous sommes à fond de 6e. Au passage sous la passerelle, pas le temps de rendre son salut à Johnny Walker, je saute sur le frein et descends les rapports jusqu’en 2e pour entrer à droite dans « Sainte Dévote ». J’attaque le vibreur sur le côté droit en faisant attention à ne pas réaccélérer avant que ma roue arrière soit revenue sur l’asphalte, sinon c’est la perte de contrôle assurée. Je lèche le rail de gauche et attaque la montée.

« Beau Rivage » est une longue enfilade faite de quatre cassures successives, imperceptibles, gauche, droite, gauche, droite, au milieu desquelles il faut tirer une ligne droite pour négocier l’ascension à fond. En haut de la montée, me voilà en 5e pour attaquer le long gauche de « Massenet » puis le droite du « Casino ». Aucun autre repère visuel autre que la compression qu’il faut passer à l’aveugle avant de freiner. A Monaco, un certain nombre de secteurs se négocient sans repère, sans visibilité. C’est pour cela qu’il faut aux « nouveaux » quelques tours avant de sentir la piste et acquérir les automatismes qui permettent de se lâcher. J’enclenche la 4e et j’essaie de profiter de l’effet banking du virage – sans tirer trop large : sur ce circuit, quelques dizaines de centimètres de trajectoires grappillés ici et là, permettent de gagner les quelques dixièmes qui font la différence.

Je repique au ras du rail pour négocier le droite suivant au ras du mur, le plus tôt et le plus fort possible. Attention, dans la descente, il faut donner un petit coup de volant à droite pour éviter la bosse, puis remettre un coup à gauche pour reprendre la trajectoire et freiner avant le droite de « Mirabeau Haut ». Un freinage violent et en dévers – l’un des plus techniques du circuit.

Je me lance ensuite vers l’épingle à gauche du « Fairmont » -anciennement appelée le « Loews », négociée en 1ère , d’une seule main –la droite- pour pouvoir amener le volant en butée. Suivent les deux droites, le « Mirabeau Bas » et le « Portier », qui conditionnent la vitesse d’entrée sous le tunnel. En 2e, trajectoire au millimètre, dosage précis de l’accélérateur… et je me jette dans le gouffre noir ! Bien sûr il est éclairé, mais la différence de luminosité entre l’entrée, l’intérieur, puis la sortie demande un ou deux tours d’accoutumance. Le tunnel est un très long droite qui se passe à fond absolu, sur une trajectoire très précise : en entrée, à gauche vers le mur ; puis je laisse la voiture revenir vers le centre de la piste.

Lorsque la lumière réapparaît, je suis à fond de 6e à 280 km/h. La chicane se jette sur nous, avec un freinage difficile, car il faut le retarder au maximum sur un asphalte bosselé -attention au blocage de roues… Pour le premier point de corde, je vise le bout de rail peint en orange fluo, puis je réouvre ma trajectoire, le plus tôt possible, pour plonger sur le vibreur de droite, toujours en 2e. Je remets les gaz au ras du rail, il faut monter les rapports jusqu’en 5e le plus vite possible. Au panneau « 50 » je repasse en 4e pour le virage à gauche du « Bureau de tabac ». Surtout, ne pas entrer trop fort à la corde au ras du vibreur, mais pas trop lentement non plus car c’est la vitesse qui doit me jeter vers le rail extérieur. Si je suis obligé de braquer pour y arriver, c’est que je n’étais pas assez vite ici !

Pas le temps de réfléchir, voilà la « Chicane de la piscine », un gauche-droite en 5e, à l’aveugle. On n’en voit la sortie que quand on est au milieu. Mieux vaut avoir la trajectoire en tête –ou du moins en avoir fait un réflexe. Je soulage un peu l’accélérateur -surtout pas touche au frein- puis reprise de gaz, à fond, jusqu’au « pif-paf » suivant, un droite-gauche. Il a été redessiné l’année dernière, et est devenu plus facile. Je suis le rail, puis j’ouvre à gauche sur le vibreur extérieur. Surtout, ne pas toucher l’énorme boudin qui éjecte instantanément vers… de la casse. Il faut soigner la sortie, préparer le passage dans la Rascasse, freiner le plus droit possible -nous avons très peu d’appui aéro à cet endroit en raison de la basse vitesse. Si la voiture est bien placée en entrée et la trajectoire parfaite, on garde le même angle de braquage dans ce double droite, sans rectifier. C’est ce qui permet en sortie de Rascasse de revenir très tôt sur les gaz.

Accélérateur à fond, je ne ménage plus les pneus, pas grave si ça patine, c’est la fin du tour. Dernier virage, le droite « Anthony Noghès », à l’aveugle, en dévers, je soulage un peu et remet à fond dès que mes roues sont droites. Vite, vite, encore quelques mètres. Ça patine un peu, aucune importance. J’active le DRS pour réduire la résistance aérodynamique. Ligne d’arrivée. Sur mon volant, s’affiche mon temps. Pas le meilleur que j’aie fait. Normal : vous m’avez alourdi ! Sans vous à bord, je serais allé plus vite !

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