35 millions envolés : Manor pourra-t-elle jouer les trompe-la-mort ?

Deux points, et tout est dépeuplé

Par Alexandre C.

16 novembre 2016 - 10:09
35 millions envolés : Manor pourra-t-ell

En 2012, Marussia avait perdu la 10e place du championnat des constructeurs à l’issue du Grand Prix du Brésil, qui concluait alors la saison. Vitaly Petrov avait réussi à rallier l’arrivée à la 11e place, ce qui suffit à Caterham dans sa lutte contre les deux autres petits poucets du plateau (avec HRT aux côtés de Marussia).

En 2016, à l’issue du Grand Prix du Brésil, cette fois-ci pénultième épreuve de la saison, Manor, ex-Marussia, a également perdu la 10e place du championnat des constructeurs, cette fois-ci face à Felipe Nasr et Sauber. Même s’il reste encore une course à Abu Dhabi, les chances de Manor, dans cette lutte du fond de grille, se sont très sérieusement estompées.

Le parallèle entre 2012 et 2016 vaut ce qu’il vaut, mais il recèle tout de même quelques enseignements. Tout d’abord, Caterham, le vainqueur d’alors, n’a pu éviter la faillite deux ans plus tard. HRT a également disparu, mais Marussia, même privée des bonus financiers liés à cette 10e place, a surnagé tant bien que mal.

En sera-t-il de même en 2017 ? La 10e place vaut 35 millions d’euros – soit la moitié du budget de Manor. Sans ce substantiel apport, la situation de l’écurie pourrait rapidement devenir précaire, au point que certaines rumeurs, dans le paddock d’Interlagos, annoncent déjà une possible disparition de l’écurie à la fin de la saison.

La situation de Manor s’est certes améliorée en 2016 : l’équipe a pu compter sur le soutien technique de Mercedes (notamment pour la fourniture moteur) pour progresser en performance, jusqu’à être capable de lutter et de battre parfois les Sauber ou les Renault en course ; les deux pilotes qui ont conclu la saison, Pascal Wehrlein et Esteban Ocon, pourraient être titulaires sans contestation aucune dans des équipes plus huppées ; l’Allemand a même marqué un point en Autriche, une première depuis l’épopée de Jules Bianchi au Grand Prix de Monaco 2014 ; Manor a réussi également à attirer quelques partenaires financiers (comme AirBnb) ; enfin, l’écurie jouit d’un potentiel sympathie non-négligeable. Au Brésil encore, la course d’Esteban Ocon doit être saluée pour son exemplarité. Le Français a manqué les points de très peu, ne cédant qu’en fin d‘épreuve face au redoutable Fernando Alonso. La F1 se joue à peu… mais la F1 est sans pitié.

La fin de saison a fait ressurgir au grand jour les immenses lacunes de Manor. L’écurie, faute de budgets, a trop peu fait progresser sa monoplace. En comparaison, Sauber, depuis son rachat par Longbow Finance, a retrouvé le souffle nécessaire pour accélérer son développement technique – et la 9e place de Felipe Nasr en est une illustration éclatante. C’est ainsi que Dave Ryan, abattu après la course, ne se montrait tout de même pas surpris de céder face à Sauber : « Nous étions inquiets à Austin et Mexico après que Sauber avait failli marquer un point, et nous savions en venant ici que le risque était élevé » commentait-il. En course au Brésil, sous la pluie, la Manor se révélait ainsi véritablement inconstante et imprévisible, obligeant ses pilotes à des jeux d’équilibriste permanents ce qui est l’indice d’une monoplace rétive et peu performante.

Des moments difficiles attendent désormais Manor. Bien entendu, on n’aimerait aucunement que cette écurie, qui a su donner la chance à Pascal Wehrlein ou Estbean Ocon cette saison, et qui pourrait encore accueillir d’autres futurs champions pour leurs débuts (rappelons-nous que Daniel Ricciardo a commencé chez HRT, ou Fernando Alonso chez Minardi), disparaisse dans l’oubli de la F1 pour rejoindre le cimetière des petits poucets. Cependant, même dans le cas où Manor survit, ces 35 millions en moins pèseront lourd dans l’équation de l’année prochaine. Manor devrait se révéler plus incapable encore de suivre la course au développement, alors même qu’un grand changement réglementaire se prépare. L’avenir est donc particulièrement ténébreux. L’équipe anglaise doit maintenant compter sur les pilotes qui paieront leur baquet le plus cher possible. La course aux millions est d’ailleurs lancée entre Felipe Nasr, Esteban Gutierrez, Jordan King et Rio Haryanto...

Dans le même temps, depuis son rachat par Longbow Finance, Sauber n’avait peut-être pas besoin de ces 35 millions pour absolument survivre en 2017. C’est pourtant ce rachat même qui a permis à l’écurie suisse de reconquérir la 10e place au championnat des constructeurs. Une fois encore, la F1 s’est révélée cruelle et impitoyable pour le plus faible. Pour Sauber, l’argent appelle l’argent ; pour Manor, l’abîme appelle l’abîme. Un éclair, puis la nuit…

Recherche

Info Formule 1

Photos

Vidéos